Test pneus AM/Enduro – Schwalbe Hans Dampf et Rock Razor : combo gagnant ?
Après deux saisons complètes de bons et loyaux services, mon fidèle Rocket Ron a enfin rendu l’âme, victime d’une coupure sur le flanc lors du passage sur un single pourtant assez propre. Il aura défrayé la chronique en m’emmenant sur des centaines de kilomètres de sentiers alpins sans faiblir, bien aidé par son montage tubeless, il est vrai. Dans ses derniers mois d’existence, il consommait plus de préventif qu’un V8 ne boit de 98 à fond de six sur l’autobahn. Mais il aura battu de nombreux records de longévité pour un pneu destiné avant tout au cross-country, malgré des flancs renforcés. Paix à son âme.
Bien, une fois la procession funéraire achevée, il était temps de faire enfin l’acquisition de pneus un peu plus adaptés. Une paire de High Rollers ? Certainement pas, leur profil carré me fait grimacer d’effroi au moindre regard : j’ai déjà bien trop donné avec ce pneu tellement peu prévisible qui décroche violemment et demande un pilotage très agressif pour révéler son vrai potentiel. Des minions ? Pourquoi pas. Ca roule déjà mieux, mais on reste dans le registre des pneus de tracteur. Bref, le rendement de feu mon Rocket Ron semblait déjà très loin.
Le semi-slick, meilleur des deux mondes ?
Mais il y a depuis deux ans de nouvelles têtes sur le marché du pneu all-mountain : les semi-slicks. Pas vraiment un concept révolutionnaire, puisqu’il existe depuis longtemps. Plutôt une remise au goût du jour. Et devinez quelle pratique le remet sur le devant de la scène ? L’enduro, évidemment. On les retrouve même sur certains tracés très roulants en DH, comme à Cairns en Australie. Il semblerait donc que l’idée soit intéressante et efficace.
Mais c’est quoi exactement un semi-slick ? Le concept est, pour un pneu destiné à la roue arrière, de proposer une bande de roulement très roulante, avec des petits crampons bas, et des crampons latéraux agressifs, comme sur un pneu orienté gravity traditionnel. Lorsque l’on monte, le vélo est droit, on profite du rendement fourni par la partie roulante du pneu. Quand on descend, le manque de grip en ligne droite a un impact limité, car 60 à 90% du freinage est assuré par la roue avant, même avec un pneu traditionnel. En revanche, en virage, on penche le vélo et les gros crampons latéraux entrent en action pour fournir une très bonne accroche.
Plusieurs fabricants proposent ce type de pneu. On peut notamment citer Maxxis avec son Minion SS, Specialized avec le Slaughter et Schwalbe avec le Rock Razor.
Rock Razor : un pneu arrière à apprivoiser
Versions
Disponible uniquement en 2.35″, mais pour les trois diamètres de roues, le Rock Razor se décline en deux carcasses et mélanges de gommes : Snakeskin et PaceStar pour la version plutôt all-mountain, Super Gravity et TrailStar pour ceux qui veulent titiller le chrono en descente sans être trop regardant au niveau du poids. J’ai choisi la première option pour le mien, afin de bénéficier de la longévité accrue que propose une gomme un peu plus dure. C’est en général un choix raisonnable pour un pneu arrière qui s’use plus rapidemment que l’avant.
Le Rock Razor taille dans la normale, avec environ 61mm aux crampons sur une jante de 21mm en interne.
Rendement
La première bonne surprise avec ce pneu, c’est son rendement à la montée, tout bonnement excellent. Il n’a dans ce registre pas grand chose à envier à un pneu comme le Rocket Ron, même sur le bitume. Certes, son poids est plus élevé : c’est le prix à payer pour une carcasse bien plus rigide et résistante, qui m’a d’ailleurs donné un peu de fil à retordre pour trouver la bonne pression. Quoi qu’il en soit, on est sur un pneu très roulant, bien plus que les candidats traditionnels de la catégorie AM/Enduro. Pas de crainte à avoir concernant l’utilisation de pressions assez basses et leur impact sur le rendement : les crampons latéraux ne viennent jamais faire défaut à la bande de roulement très rapide.
Accroche
Malgré cette rangée centrale de crampons très bas, le pneu assure une bonne motricité dans des conditions sèches à humides. Il ne faut certes pas lui en demander trop quand les singles deviennent vraiment glissants, mais on peut dire qu’il tire son épingle du jeu même lorsqu’on l’emmène sur un terrain un peu plus meuble que ce pour quoi il a été pensé. Dans le sec, il est excellent, à moins de devoir tracer son chemin dans plusieurs centimètres de poussière.
Quand on découvre le semi-slick, les premières descentes sont cependant assez rodéo, d’autant plus si, comme votre aimable serviteur, vous n’avez pas encore trouvé la bonne pression. Venant de pneus à la carcasse bien plus fine sur mon all-mountain, j’ai un peu diminué ma pression habituelle à l’arrière, mais pas assez, ce qui a exacerbé un trait de caractère typique des semi-slicks : un super accroche une fois le vélo penché, mais une vrai patinette quand il ne l’est pas.
Durant ma descente du GR54 sur Besse, j’ai pu faire l’expérience de ce phénomène déroutant. Au freinage en ligne droite à l’abord d’une courbe, l’arrière semblait partir à la moindre sollicitation du levier. Puis dans le virage, gros grip lorsque les crampons latéraux entraient en action. Avant de se retrouver à nouveau avec un arrière baladeur en ligne droite. S’en résultait une sensation assez bizarre, puisque les signaux contraires s’enchaînaient et que le pneu semblait assez imprévisible au premier abord.
Cette sensation a duré le temps d’un week-end, puis ma première sortie locale a effacé tous mes doutes. L’habitude est venue dissiper ces premières hésitations, tout comme l’utilisation de pressions plus en phase avec la rigidité de la carcasse : environ 1.7 bars. Peut-être aussi parce que je connais mes quelques boucles habituelles par cœur et que rouler “cool” sur ces dernières est synonyme d’attaque maîtrisée. Et le Rock Razor adore l’attaque. Comme avec un High Roller, il ne faut vraiment pas hésiter à pencher le vélo pour tirer profit des gros crampons. En revanche, contrairement à celui-ci, la limite se fait plutôt bien sentir et en fait un pneu rassurant.
De fait, une fois l’habitude prise, le pneu s’avère très agréable quel que soit son état de forme du moment et ses ambitions vis à vis du chronomètre.
Protection et usure
Malgré un poids contenu (665g annoncés en 26″), la rigidité et l’épaisseur de la carcasse mettent en confiance. Pour autant, il ne m’aura fallu que quelques sorties pour voir apparaître deux coupures de quelques millimètres à la naissance d’un crampon après une réception sur une arrête rocheuse. Mis à part opter pour des carcasses de DH (et encore), c’est souvent un peu la roulette russe à ce niveau là, et il serait abusif de considérer un pneu comme particulièrement fragile à cause d’un unique incident, d’autant plus vu les circonstances. Tout comme il serait compliqué pour moi de recommander mon ancien combo Rocket Ron / Nobby Nic pour un utilisation montagne, ces derniers étant notoirement fragiles, nonobstant mon expérience positive. Mon avis reste donc réservé sur la résistance aux crevaisons et coupures mais le niveau de protection a sinon l’air plutôt bon.
L’usure peut faire peur, surtout quand on connait la réputation de Schwalbe à ce niveau, et qu’on considère la taille des crampons sur la rangée centrale. Dans les faits, tout semble bien se passer pour le moment sur mon exemplaire, qui ne présente pas de signe d’usure avancée après 250km en montagne.
Hans Dampf : un pneu parfait pour le rideur moyen ?
“Hans Dampf” se traduit plus ou moins en anglais par “Jack of all trades”. Non, je ne parle pas allemand, mais j’ai internet (même si je n’ai pas Free, donc je n’ai peut-être pas tout compris). On est donc sur la notion d’un pneu à tout faire.
C’est un pneu non directionnel (on peut le monter dans un sens ou dans l’autre), utilisé aussi bien à l’avant qu’à l’arrière, et qui est censé aussi bien convenir aux climats humides qu’aux sentiers asséchés. Bref, étant donné que le père Noël n’existe pas plus qu’un pneu qui excelle dans toutes les conditions, la recette miracle proposée sur le papier a bien du mal à pénétrer nos esprits avisés.
Et pourtant, il est plutôt apprécié par la communauté et bien noté un peu partout. Pourquoi tant d’amour ? Serait-ce sa bonne bouille et ses gros crampons moto-style ? Son gros ballon ? Voyons ce qu’il en est.
Versions
Comme le Rock Razor, le Hans Dampf est disponible uniquement en 2.35″ de large, du 26″ au 29″ et en deux carcasses et mélanges de gomme. A la différence du premier, on trouve également une version Trailstar associée à la carcasse Snakeskin, ce qui permet de gagner en grip tout en conservant un poids réduit. J’ai là encore opté pour la version Snakeskin/PaceStar, surtout parce que j’ai bénéficié d’une réduction intéressante. Ce n’est pas un problème sur ce pneu qui, comme on va le voir, se comporte très bien, mais en monte avant il ne faut pas hésiter à passer sur une version TrailStar pour gagner encore en grip. Le prix a cependant lui aussi tendance à grimper, alors que les pneus Schwalbe sont déjà plutôt onéreux à la base.
Annoncé à 2.35″, le pneu taille plutôt gros : environ 63mm aux crampons sur une jante de 21mm interne. C’est plus que les High Roller II 2.4″ sur du 28mm, mesurés à environ 61mm.
Rendement
Monté à l’avant, je ne peux pas dire grand chose sur le rendement de ce boudin, son influence étant minimale, d’autant plus avec le nez du vélo qui pointe vers le haut.
Accroche
Pour profiter du gros ballon de ce pneu, il ne faut pas hésiter à descendre en pression. Pour 85kg, 1.5 bars semble pour moi un bon compromis entre grip et survie de mes jantes.
L’accroche est excellente au freinage comme en virage, que le terrain soit sec ou meuble. Surtout, le Hans Dampf est un pneu au profil rond, ce qui le rend extrêmement prévisible, rassurant et accessible. Pas besoin d’être à l’attaque et faire toucher l’intérieur du virage au cintre pour qu’il s’exprime. Pas de transition délicate quand on penche le vélo. C’est un pneu qui met rapidement en confiance et prévient bien avant de partir. Je ne l’ai pas testé à l’arrière, mais tout laisse à penser qu’il est très facilement récupérable quand on excède ses limites. C’est sans doute arrivé plusieurs fois à l’avant depuis que je l’utilise, mais ces qualités en font un tel non-événement que je l’ai sans doute à peine remarqué, mis à part lors de quelques dérapages des deux roues dans le Diois.
Il n’est donc peut-être pas aussi bon que certains pneus plus agressifs ou spécialisés, mais encore faut-il que ceux-ci soient exploités à leur plein potentiel pour vraiment prendre l’ascendant. Le Hans Dampf est donc à mon avis un excellent pneu pour rouler à bonne allure sans se prendre la tête et sans mauvaise surprise. Et en ce sens, on peut dire que son nom est extrêmement bien choisi.
Protection et usure
Il est peu commun de rencontrer des problèmes de crevaison, coupures ou déchirures sur un pneu en monte avant. Mon Hans Dampf n’a pour le moment pas failli à la règle. Comme sur le Rock Razor, la carcasse est plutôt épaisse et met en confiance.
Rien à signaler non plus au niveau usure, les gros crampons sont en parfait état. Peut-être est-ce dû à leur forme carré, mais ils semblent bien plus résistants que sur un Nobby Nic ou un High Roller, plus larges sur la rangée centrale, et qui ont tendance à se détériorer rapidement.
Conclusion : le duo parfait ?
Pour
- Le Rock Razor possède un rendement redoutable tout en fournissant une accroche de qualité en virage.
- Prévisible et rassurant, le Hans Dampf offre un haut niveau de performance sans devoir s’élever au niveau du top 10 EWS.
- Le niveau de protection offert correspond bien aux besoins de sorties all-mountain. Le rendement du Rock Razor associé à l’accessibilité du Hans Dampf en font un superbe combo pour le rider moyen qui veut enchaîner le D+ sans souffrir plus que nécessaire et se faire plaisir en montagne sans sacrifier les performances en descente.
Contre
- Rançon de son rendement, le Rock Razor peinera à trouver de la traction quand le terrain devient boueux.
- Les riders très agressifs préféreront au Hans Dampf un pneu plus exigeant qui correspond plus à leur style et s’avérera un peu plus efficace pour attaquer dans certaines conditions.
- Pour une pratique résolument tournée vers l’enduro et la recherche du chrono, d’autres mariages offrent une performance accrue au prix d’un engagement physique et technique supérieur.
Verdict
Pour une pratique all-mountain, je ne peux que recommander ces deux pneus dans la configuration que j’ai adopté : ils offrent à mon sens le meilleur compromis pour se faire plaisir lors des longues sorties en montagne. Facile à emmener sans sacrifier la protection, ce combo reste très efficace en descente et constitue un choix de premier plan pour la majorité des pratiquants.
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Très intéressant
Merci pour le très bon descriptif, avec le brin d’humour qui va avec!!