Test : Rockshox Boxxer Team 2015 | Post Mortem

Pour bien commencer la nouvelle année et une nouvelle décennie espérons-le fertile, ceci est le premier article de la toute nouvelle série Post Mortem, dans laquelle je publierai des tests de matos vintage, ou pas, dépassé, ou pas, mais dans tous les cas trop vieux pour être encore trouvé neuf sur le marché actuel.

Qu’à cela ne tienne, bien loin de moi l’idée de philosopher sur le “c’était mieux avant”. Ce type de contenu sera en revanche je l’espère intéressant pour ceux qui scrutent le marché de l’occasion, pensent miser sur d’anciens modèles phares maintenant disponibles à vil prix, ou veulent monter une bicyclette vintage pour aller tâter des grosses miches (aka chercher le pain) en caleçon et plus si affinité.

Quoi de mieux pour commencer que se pencher sur l’un des derniers représentants de la fin d’une époque. Comme évoqué dans mon article qui détaille la nouvelle gamme Rockshox Signature Series, la Boxxer est maintenant uniquement disponible en version air alors qu’elle constituait une des dernières options pour les amoureux du ressort hélicoïdal en DH.

L’occasion donc pour moi de revenir sur plusieurs années de ride en sa compagnie, pour le meilleur… et pour le pire.

 

Fiche technique


Flash-back historique : en 2015, Rockshox rafraichit de manière conséquente son modèle DH, qui verra peu de changements dans les années à suivre. La marque décline alors la Boxxer en 3 modèles : la RC, Team, et World Cup. Cette segmentation perdurera jusqu’à cette année où Rockshox chamboule tout avec ses Signature Series sur la gamme 2020.

Si la 40 de Fox a entièrement transitionné vers l’air, la Boxxer est à ce moment là un modèle qui ne fait pas de choix tranché, même si la version la plus dispendieuse, la World Cup, utilise un ressort pneumatique. La Team est censé être sur un pied d’égalité mais contenter ceux qui veulent conserver un ressort hélicoïdal. Il est alors possible de convertir une Team en WC grâce au kit vendu par la marque pour passer du ressort à l’air.

Ces deux modèles utilisent la (alors) nouvelle cartouche Charger, qui suscita un enthousiasme conséquent sur la nouvelle Pike lancée un an plus tôt. On ne présente plus ce damper que l’on connait maintenant bien et qui en est à sa deuxième ou troisième itération, selon l’importance que l’on veut bien donner aux révisions mineures. Enfin, la Boxxer RC utilise l’ancienne cartouche Motion Control que l’on trouve toujours aujourd’hui sur les modèles plus bas de gamme comme la Yari.

 

Rockshox Boxxer - Té

 

Comme ses soeurettes, la Boxxer Team met à profit des plongeurs de 35mm et ne propose que deux réglages : LSC et LSR, soit compression et rebond basse vitesse. Cette réduction du nombre de réglages disponibles est un choix fait par la marque de simplifier le setup de ses suspensions, tendance déjà esquissée par d’autres fabricants quelques années auparavant, avec un succès… variable. Nous aurons d’ailleurs l’occasion de revenir sur le sujet lors d’un prochain test de matériel vintage à paraitre dans quelques semaines.

C’est aussi une cassure par rapport aux modèles des années précédentes équipés de la Motion Control qui offrait les 4 molettes sacrées : HSC/LSC/HSR/LSR. Il faut au passage noter que SRAM utilise alors des réglages de rebond différents d’un vrai HSR/LSR : le rebond est divisé en début de course et fin de course plutôt que basse vitesse et haute vitesse.

Côté chassis, pas de grand changement donc, mis à part quelques allègements ça et là, et l’apparition de versions 650B. Nous sommes en 2014/2015, la révolution est alors au 27.5″.

 

Sur le terrain


Le ressort, parait-il, c’est comme le saucisson, c’est la vie. Si vous suivez Glisse Alpine, vous savez déjà que pour moi, le ressort, c’est plutôt la roulette russe.

Evaluer une suspension est une opération qui comprend moult dimensions. Un aspect intéressant est celui du confort et de la performance. Vont-ils de pair ou sont-ils en concurrence ? Il y a bien des façons de tripoter le sujet pour arriver à une conclusion.

“Le ressort, parait-il, c’est comme le saucisson, c’est la vie.”

Par exemple, on peut d’un côté arguer que oui, ils vont de pair, car une suspension se doit de suivre au mieux le terrain pour conférer un maximum de grip et offrir un niveau de performance élevé. Ce faisant, elle fournit un niveau de confort tout aussi élevé puisqu’elle travaille de manière très active et à priori optimale en absorbant un maximum le terrain.

D’un autre côté, les rideurs au plus haut niveau roulent avec des réglages qui varient sur une large plage d’un individu à l’autre mais ont tendance à être davantage du côté bout de bois que marshmallow. Un ressort assez dur permet de garder une assiette correcte dans le très pentu, les compressions sont importantes à haut niveau, et un vélo qui survole les aspérités du terrain est plus rapide qu’un autre qui l’épouse.

Bref, un des selling points de SRAM lors de l’adoption de cette plage de réglages limitée était qu’après l’avoir faite tester aux pro rideurs sponsorisés par la marque, aucun n’avait ressenti le besoin de modifier la HSC, ce qui confortait la décision prise par Rockshox de réduire le nombre de réglages externes disponibles. Et je n’ai aucun mal à croire que la fourche que j’ai eu entre les mains pendant quelques saisons était tunnée pour les pros. Aucun.

 

Rockshox Boxxer - Compression

 

Armé du ressort rouge/medium donné pour des rideurs de 72 à 82kg pour un poids plus proche des 90kg équipé, j’ai toujours été plutôt du côté mou de la force à ce niveau, bien que n’ayant jamais talonné qu’une seule fois de manière vraiment violente, et le support m’a toujours semblé bon en milieu de débattement.

Pourtant, ce ressort sous-taillé n’a en rien atténué la violence du ride avec ce qui m’a toujours semblé être une cartouche over-dampened, à tel point que je me suis longtemps demandé si une souris d’atelier n’avait pas mangé quelques rondelles avant l’assemblage final de mon modèle.

Avec la LSC au maximum, il est presque possible de courir une épreuve de XC tant les mouvements de la fourche sont tempérés. LSC au minimum, on se demande s’il ne faut pas tourner dans l’autre sens pour avoir une fourche plus souple. C’est pratique pour gravir les quelques mètres de D+ qui séparent le parking des remontées, mais le bénéfice s’arrête là.

 

Rockshox Boxxer - Rebond

 

Côté rigidité, les plongeurs de 35mm souvent opposés à ceux de 40 du modèle de la marque au renard ne m’ont jamais parus sous-dimensionnés. Aucune complainte de ce côté, malgré la tendance actuelle qui va bientôt produire des plongeurs de 50mm pour du XC. C’est d’ailleurs l’occasion de rappeler que plus de rigidité ne veut pas forcément dire mieux, et qu’à l’aube de la sortie de versions 38mm de fourches d’enduro chez plusieurs marques cette course à la rigidité ultime ne fait pas consensus au sein même de l’industrie.

Puisqu’on parle plongeurs, c’est l’occasion d’évoquer un autre problème, auquel vous n’avez peut-être jamais pensé et qui est à ma grande surprise largement absent des internets : le rayon de braquage. Mais euh en DH on roule à la vitesse de l’éclair et on couche le vélo, c’est quoi cette histoire de rayon de braquage ?

“Le moindre passage dans une section tortueuse à basse vitesse peut devenir ridicule.”

L’écartement des plongeurs varie d’un manufacturier à l’autre, et Rockshox propose la distance la plus réduite par rapport à ses concurrents, l’extrême opposé étant Fox avec sa 40. Dans la majorité des cas, cet écartement n’est pas un problème. Si toutefois la fourche est montée sur un cadre carbone aux tubes sur-dimensionnés, on se retrouve très rapidement en butée contre le cadre, et le moindre passage dans une section tortueuse à basse vitesse peut devenir ridicule. Bref, sur un cadre Commencal alu en bikepark, foncez, sur un Tues carbone en tracé épinglu, fuyez.

Malheureusement, ma liste de griefs envers ce modèle ne s’arrête pas là. Il est maintenant l’heure de passer aux problèmes de fiabilité. Je vais rester succinct sur le SAV SRAM pour le moment, mon expérience personnelle avec celui-ci ayant au fil du temps pris des proportions si épiques que j’ai finalement récemment décidé de les narrer en long et en large dans un article dédié. Concentrons nous donc sur les faits.

 

Rockshox Boxxer - Joints racleurs

 

Les plongeurs SRAM sont en crystal. Ou en raclette plutôt, parce que l’image est plus parlante : un coup de chaud, on racle, et la surface part dans l’assiette. C’est un peu la même chose qui est arrivée à mon plongeur gauche, qui est rapidemment passé du noir au gris sur les premiers centimètres au-dessus du joint racleur.

Le problème est tellement répandu que je ne sais s’il faut en rire ou en pleurer. Je vous laisse faire une recherche sur des Boxxer d’occasion et scruter cette partie du plongeur gauche pour vous rendre compte de l’épidémie, tout en joignant quelques clichés volés sur des annonces consultées une journée pluvieuse en me renseignant sur les prix du marché.

“Les plongeurs SRAM sont en crystal.”

Le problème est connu de la marque, et finalement de tout le monde puisqu’en me renseignant autour de moi je suis à l’époque arrivé à la très empirique conclusion que 80% des rideurs dans un cercle d’amis d’amis qui avaient une Boxxer avaient déjà du la renvoyer en SAV pour ce même problème.

La faute à des tolérances de bague de guidage trop lâches d’après certains, mais peut-être bien aussi des joints racleurs quand on pense au fait qu’ils ont changé sur les modèles suivants. Peut-être que le revêtement Fast Black des plongeurs est aussi tout simplement trop peu résistant. Interviewé par Pinkbike, Jeremiah Boobar, Product Manager chez RockShox, affirmait que cette “sauce secrète” n’était pas “super-expensive”. S’il est parfois possible de faire mieux pour moins cher, nous conviendront que faire des économies de bout de chandelle sur la résistance aux frottements des plongeurs n’est pas le meilleur moyen d’optimiser les coûts de production…

Bref, mon plongeur a été changé, non sans débourser quelques deniers durement gagnés, et j’ai fort heureusement pu passer à autre chose avant de voir le problème réapparaitre.

 

7 Laux Bikepark

 

Performance et fiabilité sont deux facettes indispensables à un produit de qualité. L’un va parfois sans l’autre, et l’on s’en contente souvent, les bénéfices prenant le pas sur les inconvénients. Un composant aux performances modestes mais dont la longévité est assurée est économique et permet de s’aventurer confiant dans des endroits reculés. Un autre qui échange cette fiabilité pour une performance hors du commun est un choix qui s’entend pour celui ou celle qui veut le top du top, quitte à passer un temps non négligeable en entretien, rebuild et autres joyeusetés. Mais quand aucun de ces deux éléments n’est au rendez-vous, la pilule est bien plus difficile à faire passer.

Finalement, le problème de cette Boxxer Team n’est sans doute pas qu’elle ne soit pas capable de performer dans l’absolu, mais plutôt qu’elle ne propose pas une plage de réglages externes convenable et facilement accessibles. Pas besoin d’un doctorat en thermo-physique nucléaire pour réorganiser quelques rondelles, mais l’opération reste infiniment plus compliquée que tourner une molette ou tout simplement profiter d’un réglage d’usine équilibré comme on en trouve chez d’autres marques.

“Nous ne sommes pas tous Danny Hart.”

C’est d’autant plus critique lorsqu’on considère que ce modèle partage la même cartouche en version air et ressort, ce qui est peut-être le talon d’Achille de cette Boxxer Team dérivée de la version World Cup. Quoi qu’il en soit, nous verrons dans un futur article que cette fourche n’est pas la seule suspension à ressort de la marque que je n’ai jamais réussi à faire fonctionner correctement faute d’une plage de réglages adaptée.

Nous ne sommes pas tous Danny Hart, et le rideur moyen en bikepark profite davantage d’une suspension qui lui permet de rouler toute la journée en limitant la fatigue et les douleurs plutôt qu’un modèle qui le pousse au bout de sa vie après quelques heures pour gagner une demi-seconde à la minute, quand bien-même ce soit le cas.

 

Verdict


Fuyez ! Ce modèle souffre de bien trop de problèmes pour constituer une option intéressante, même sur le marché de l’occasion. Mis à part le toucher à vil prix et avoir pour projet de passer un temps non négligeable à empiler et dépiler des rondelles tout en allumant son cierge quotidien pour s’assurer de la survie des plongeurs, l’abstinence est de mise.

 

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Sébastien

Papa de Glisse Alpine et homme à tout faire depuis 2016. Rideur. Editeur. Photographe. Développeur. SysAdmin. Web Perf. SEO. Marketing. Café.

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